Des cigales et des œuvres
La Fondation Marguerite et Aimé Maeght à Saint-Paul de Vence met à l'honneur quelques artistes remarquables du XXe siècle, certains Chagall, Braque ou Bacon...
C'est au milieu de la pinède de St-Paul de Vence dans les Alpes-Maritimes que se cache la Fondation Maeght. On la découvre après moultes pérégrinations sur des chemins boisés, où les cigales ronronnent et s'amusent de nous voir errer en sandalettes à la recherche du sacro-saint jardin, alors qu'un parking se trouve en fait juste à côté.
Une fois à l'intérieur, c'est un domaine un peu particulier qui s'offre à la vue du visiteur: des sculptures monumentales de Cabanes, Mirò ou Calder, tantôt colorées, tantôt d'un noir glaçant. Ici et là gargouillent quelques fontaines, celle de Pol Bury avec ses cylindres magiques, ou encore celle perdue au coeur du labyrinthe imaginé par Mirò.
En face de l'entrée principale, une terrasse où passent quelques sculptures de Giacometti, insouciantes et rêveuses, rigides et soucieuses. Un petit coin paisible où les oeuvres d'art et la nature vivent en parfaite harmonie, sauf quand les pins parasols décident de les mitrailler d'aiguilles. Le bassin en mosaïque de Georges Braque a souvent du mal à s'en remettre...
Dans la galerie, une simple salle contient les oeuvres d'intérieur de l'exposition permanente. Là encore les enfants courent au milieu des sculptures de Calder et de Giacometti... Ici les oeuvres ont perdu un peu de leur caractère sacré, puisqu'on semble vivre parmi elles. Quelques Chagall, un grand tableau de Derain "La Chasse" et un autre de Bonnard "L'été". L'exposition temporaire qui a pour thème "Face à l'oeuvre" s'étend quant à elle sur plusieurs pièces et couloirs. On y retrouve les artistes modernes les plus fameux comme Otto Dix, Chagall, Bacon, Calder ou encore Kandinsky. J'y ai fait pour ma part quelques découvertes enivrantes comme ce tableau de Bernard Moninot, "Silent listen", où l'on se plonge dans un bleu profond en deux dimensions, sur lequel se détachent des formes simples, un peu comme un mobile.
Indescriptible et envoûtant.
Plus loin d'autres artistes contemporains, mais aussi quelques dessins secrets, portraits de Marguerite Maeght, et cette note amusante crayonnée au stylo bille par Giacometti: "La tête est très mal dessinée, trop sombre, mais il ne faut pas recommencer le dessin."
Ne recommencez pas, non. Gardez vos imperfections d'hommes-artistes qui nous rassurent et nous touchent. Il est vrai que lorsque l'on pénètre dans la Fondation Maeght, nous ne rentrons pas vraiment dans un musée, pour reprendre les mots d'André Malraux lors de l'inauguration du lieu, il y a pile 50 ans.
"Ceci n'est pas un musée. Ici est tenté quelque chose qui n'a jamais été tenté: créer l'univers dans lequel l'art moderne pourrait trouver à la fois sa place et cet arrière-monde qui s'est appelé autrefois le surnaturel."
A lire avec la voix tonitruante et emphatique de Malraux, et à méditer, dans le silence des nuits du sud qui s'installe désormais sur la pinède Saint-Pauloise. Tiens, les cigales ne rient plus...
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